Des corbeaux. Ils étaient revenus en grand nombre dans l'esprit de Red queen et ainsi, dans cette triste période, ses vieux démons refaisaient surface. Ils lui coassaient dans les oreilles lorsque son attention vacillait, ils s’immisçaient sans ses profonds cauchemars, là ou personne, même pas elle, ne pouvait venir la secourir. Dans la nuit, donc, elle les contemplait la bouffer de l’intérieur sans qu'elle ne puis rien faire, mis appart se réveiller en sursaut les larmes aux yeux.

La faim tiraillait toujours le clan qui sombrait peu à peu dans la folie. Certains tournaient en rond des jours entiers dans leurs tanières, d'autres, croyaient par moment sentir de la nourriture et partaient des jours entiers en espérant trouver quelque chose, ce qui ne faisait qu'affaiblir leurs forces. Les adultes commençaient à regarder d'un mauvais œil les louveteaux et les vieux, comme pour leur dire qu'on se passerait bien d'eux. Qu'on se passerait bien de tuer les forces de ceux qui en ont encore, juste pour les nourrir, eux. Bien sur, si la faim altérait leur jugement, les aériens restaient cependant solidaires, tenant à chaque membre de leur clan. Tenant à, comme certains le disaient, "leur grande famille"

Kenya vagabondait donc d'un regard lassé sur ses terres. La demoiselle, il faut le dire, faisait peine à voir car en plus d'être plus petite que la moyenne, elle était maintenant maigre comme un clou. De plus, la maladie qu'elle traînait depuis le début de l'hiver et dont elle n'arrivait pas à se défaire l'affaiblissait de plus en plus. Une quinte de toux la pris et son estomac se tordit tandis qu'un souffle au cœur la pris. Elle eut un rictus narquois et se dit à l'intention de son corps :

*Woh, calme toi, tu vas pas commencer à m'lacher. Tsss, ça craint.*


C'aurait été bien sympa qu'elle continue sa petite discussion avec chacun de ses organes mais la jeune louve aux yeux de sang releva vite la tête en s’apercevant qu'un inconnu se trouvait à quelques mètres d'elle et lui tournait le dos tout en dégustant un lapin. La demoiselle avança à pas feutrés vers cette personne et une fois qu'elle se trouva plus proche, elle déclara avec une ironie assassine :

- Ça va ? Tranquille ? Non mais y a pas d'souci! Viens après s'tu veux je t'emmène dans nos tanières pour que tu puisses faire une petite sieste digestive!

Suite à ça, elle montra les crocs, histoire de bien lui certifier qu'il ne s'agissait pas là d'un petit trait d'humour léger.
Elle n'était pas d'humeur à jouer ou à rire. Elle en avait ras le cul, pour tout vous avouer. Ras le cul d'avoir faim, ras le cul de voir sa petite avoir faim, ras le cul d'entendre la complainte gémissante des siens qui mourraient à petit feu. Ras le cul de voir des étrangers fouler les frontières des ses terres. Elle n'était vraiment pas d'humeur, non. Kenya se campa sur ses pattes et poussa un grognement exacerbé. Tous les poils de son dos se dressèrent tandis que ses muscles se contractèrent dans une poussée qui la propulsa vers sa cible, tous crocs dehors.