Je frissonnai. Il ne faisait pas très chaud en cette période de l'année près du Lac Argenté. La nuit était belle et dégagée, le vent n'en était que plus frais. Toutefois, il me caressait la fourrure sans violence : une douce brise qui s'insinuait entre mes poils. Les plumes de mes ailes ne demandaient qu'à se déployer et profiter de l'aide de ce courant d'air.

Mais je n'avais pas le temps de penser à ça maintenant. Clous de Girofle, clous de Girofle... Ma patte arrière me faisait un peu souffrir. Bien que ce ne soit pas handicapant, lorsque l'on aime se balader loin de son territoire comme moi, cela devenait gênant. Et voler n'était pas toujours la bonne solution. Non,le mieux était de trouver au plus vite de ce remède et de se débarrasser de ce petit tracas vite fait,bien fait.

Après avoir traversé les collines de l'oubli en résistant à l'envie de regarder le soleil, j'avais enfin atteint les abords de ce lac pur.
J'étais un peu exténuée et l'envie de faire une petite sieste près de l'eau me taraudait. Je m'approchais de l'eau claire et pris une petite lampée. Aaah! qu'est-ce que ça faisait du bien..
Tout près, un buisson abritait l'objet de ma quête. Ils étaient là, ils m'attendaient sagement.

Une fois ma patte soignée, je m'allongeai non loin du buisson, non loin de l'eau, observant le reflet de la belle lune argentée danser dans l'eau et attendant le sommeil m'emporter.

Je sursautai, dérangée par une voix inconnue. Un loup de couleur sang se tenait là devant moi, l'air séducteur. Darling? de quel droit se permettait-il? Ses pattes déformées par les blessures et cicatrices témoignaient d'une vie plutôt turbulente. Ce ne devait pas être le genre de loup a fréquenter pour une louve comme moi. Et pour qui se prenait-il? L’aborder de cette façon, c'était totalement déplacé! Ils ne se connaissaient même pas! Et d'ailleurs, qui était-il? Lui non plus n'avait pas l'air d'être chez lui. Je ne l'avait jamais vu au clan.

Je me relevais en gardant l’œil sur lui. Prudente, je fis un pas en arrière et me postai sur mes gardes. Ma douleur ne s'était pas encore complètement rétablie mais il ne fallait rien laisser transparaître. Je ne voulais pas combattre, j'étais fatiguée et mon état ne le permettait que très peu. Face à ce loup sûr de lui, j'aurais certainement perdu. Je fronçai les sourcils, l'air méfiant. En tout cas s'il attaquait, j'étais prête à riposter. Le loup blanc et sang agita la queue. Il ... voulait jouer? A quoi? Mon inquiétude se renforça.
De la chance.. décidément ce loup me mettait mal à l'aise. Il avait l'air vraiment dangereux. Je me sentais pétrifiée.

Je lâchais un grognement.
- Et à qui suis-je censée avoir l'honneur?, raillais-je. Qui t'as permis de me réveiller?

Les pattes plantées dans le sol, je grognais encore. Pourquoi ce loup venait m'enquiquiner au milieu de la nuit?

Je déglutis. Ce loup ne me mettait vraiment pas à l'aise du tout. J'avais envie de fuir. Loin. Très loin.

Je ne le cernais pas du tout. Il voulais jouer, il voulais me tuer, mais finalement non... Il me draguait et faisait l'intéressant. Pas vraiment le genre de mâle que j'affectionne tout particulièrement, en fin de compte.

Et en plus, maintenant, il était totalement collé à ma truffe. Je pouvais sentir son souffle humide. Je restai un moment immobile, sans respirer, ne sachant pas quoi faire face à ce genre de réaction subite, les yeux ronds comme des soucoupes.

Je finis par sentir mes pattes arrières défaillir et m'assis contre mon gré sur mon postérieur. L'herbe était fraiche et je ressentis de nouveau la brise légère entre mes plumes.

J'essayais de reprendre quelques peu mes esprits. Ce qui n'était pas aisé étant donné qu'un mâle à la fourrure sanguinolente se tenait devant moi, m'observant, me draguant et souhaitant jouer à peut être me tuer... Que vais-je bien pouvoir faire? Comment me sortir de là ? Je suis coincée, je vais mourir...
Je pris une profonde inspiration, les yeux fermés. Lorsque je les rouvris, un papillon passa devant mon museau et me fis éternuer.

- Aaaaatchoum !!