Launysk est née loin des terres d’Estryä, dans des contrées glaciales où l’on ne vit pas, l’on y survit, où tous les loups sont solidaires pour lutter contre les cruautés du destin.
Et pourtant, les premiers mois de sa vie ont été les meilleurs… Le louveteau qu’elle était enchantait ses parents, tellement elle était radieuse. Sa portée comprenait également deux mâles et une autre femelle, tous plus adorables les uns que les autres, mais Launysk avait un petit quelque chose qui la rendait plus fascinante.
La petite ‘Nysk était promise à un grand avenir, pourquoi pas même Alpha de sa meute. Cependant, le malheur ne tarda pas à pointer le bout de sa truffe. Un jour de printemps, alors que Launysk entamait son adolescence, elle fut prise de terribles convulsions, et les loups se trouvant autour d’elle furent frappés d’horreur en voyant cette jeune louve se débattre sur le sol contre un ennemi invisible, à l’intérieur d’elle. Certains anciens disaient qu’un démon envoyé par les forces des Ténèbres l’avait possédée.
Depuis cet étrange épisode, les congénères de la femelle la regardaient avec crainte, comme effrayés par sa présence.
Quelques semaines plus tard, l’Alpha du clan vint à sa rencontre, accompagné du Bêta et de ses parents, accablés de tristesse. Après une longue discussion sans queue ni tête sur les devoirs de chaque membre de la tribu, sur l’importance de sauver la majorité au dépend de la minorité, on lui annonça qu’elle était bannie de la meute. Elle s’en alla donc encore sous le choc de cette décision, laissant derrière elle tout ce qu’elle avait et tous ceux qu’elle aimait.
Launysk voyagea pendant des jours et des jours, ne s’arrêtant que pour boire et chasser, ne se reposant que quelques minutes. Elle voulait être le plus loin possible de son clan, comme si cela lui permettrait de l’oublier. Elle savait très bien que depuis le mystérieux événement, quelque chose avait changé en elle : elle ne pensait, ne voyait, ne sentait, n’entendait plus comme les autres. ‘Nysk elle-même n’aurait su expliquer ce qui s’était passé.
Pendant son périple, elle apprit à se battre, à survivre toute seule, l’opposé de ce que lui avait appris son ancienne tribu. A présent, elle n’avait besoin de personne pour subsister. Elle était devenue une vraie bête.
Un matin d’hiver, ses pas la menèrent près d’une cascade. Cette endroit se trouvait être la Source Cachée. Peu à peu, la Pierre Mentale fit son effet : Launysk redevint la splendide louve qu’elle avait été, autant physiquement que mentalement. Néanmoins, elle ne put redevenir saine d’esprit. La démence qui l’habitait était juste endormie… d’un sommeil très léger. A tout moment, son esprit pouvait flancher, et réveiller cette folie.
Elle fut donc accueillie par la tribu des Voix de l’Eau en pleine possession de ses moyens avec son accent chantant et langoureux, coulant comme un ruisseau. Grâce (ou à cause) de sa beauté, elle ne passa pas longtemps inaperçue. Mais elle ne tissa aucun lien avec ses nouveaux congénères, car elle ne voulait plus souffrir d’un autre rejet de ses proches.
Launysk vit donc sa petite vie tranquille au sein de la meute de l’Eau, sous l’apparence d’une femelle extravertie, lunatique, joyeuse, pleine de répartie, fofolle et qui se fiche pas mal des limites de territoire. Mais dans son âme, tapi dans l’ombre, son sombre Ennemi pèse sur sa conscience, comme une épée de Damoclès prête à s’abattre.