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Lorsq’un espion
Rencontre un autre espion

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Il ne faut pas laisser la proie pour l'ombre

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Les terres du Feu… cela faisait bien longtemps que Pandore n’y avait pas remis les pattes. Et en vérité, elle n’avait pas la moindre envie d’y retourner. Seulement, son devoir l’y obligeait : depuis quelques temps, la ténébreuse louve sentait que, derrière le calme de l’hiver, Estryä toute entière grondait sourdement. En tant qu’espionne, son instinct lui dictait d’aller faire un tour sur les territoires ennemis. La tribu des Crocs de Feu lui était apparue comme le plus grand danger.
Après deux jours de marche, pendant lesquels la femelle au pelage couleur corbeau remonta le cours d’eau de la Rivière Rouge en passant par les Hautes Pierres, elle arriva enfin sur les terres de Blackmist. Plus précisément, tout près de la Cascade de Pain. Elle avait déjà entendu parler de la légende qui entourait ce lieu. Et elle ne savait pas trop quoi en penser. Était-ce vrai ? Était-ce faux ? Pour l’espionne au regard de glace, un seul moyen de le prouver : il fallait tester. Cependant, puisqu’aucun loup assez fou n’avait tenté le diable et plongé tête la première dans l’eau maudite, le mystère restait intact.
Sortant de ses pensées divagantes, Pandore écouta attentivement les sons autour d’elle. Ce n’était pas le moment de se faire surprendre. De plus, elle avait cru entendre au loin comme un léger bruit de galopade.

*Ce doit être un rongeur…*

Supposa-t-elle.

Continuant sa progression, elle finit par apercevoir derrière les fourrés la fameuse Cascade. Songeant qu’il était plus sage de rester à couvert pour le moment, elle se trouva un abri d’où elle pouvait voir la rive.
Soudain, un lapin à la fourrure aussi blanche que le manteau qui recouvrait toutes les terres d’Estryä arriva en trombe dans la forêt, terrorisé. Il s’arrêta non loin de la sombre louve, sa cage thoracique se soulevant et se rabaissant à un rythme effréné.
Se rendant compte que la faim commençait à se faire sentir, la noiraude décida qu’un encas ne lui ferait pas de mal. Bien au contraire.
Plaquant son ventre contre le sol, elle rampa tel un serpent, s’approchant de plus en plus de sa proie. Cette dernière ne remarquait même pas la présence du prédateur. En effet, malgré l’épaisse couche de flocons tombés sur la terre, Pandore était silencieuse comme une ombre. Elle avait appris à se déplacer dans la neige sans la faire crisser, et sans laisser de traces. Premièrement, il fallait bien répartir le poids sur les quatre pattes puis, tout en douceur, balayer derrière soi les empreintes avec la queue.
En conclusion, même si l’on ne possède pas un pelage en conséquence -le noir n’est pas très discret en hiver-, on peut toujours se rabattre sur la discrétion.
Après un bond formidable, elle put déguster son repas, protégée des regards dans sa cachette.
Tout à coup, elle entendit un battement d’aile, suivit de pas, beaucoup moins feutrés que les siens. Enterrant en toute hâte les restes de son festin, elle jeta un coup d’œil sur le décor.
C’est là qu’elle vit un loup couleur améthyste, doté d’ailes membraneuses, comme celles d’un démon. Il se dirigeait vers la Cascade. Et d’après les effluves qui émanaient de lui, il faisait partie de la tribu des Crocs de Feu.
L’espionne au pelage de nuit sans lune hésita un instant, puis finit par sortir des buissons. Elle resta à une distance respectueuse de l’autre canidé, le toisant avec méfiance, sur la défensive.

HS:

Lorsq’un espion
Rencontre un autre espion

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N’essaie pas d’attaquer le démon de front. Il serait trop content que tu t’occupes de lui. Au contraire, traite-le par le mépris, comme un chien gênant dont on veut se débarrasser.

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L’inconnu aux ailes membraneuses examina du regard la louve au pelage couleur corbeau. Aucune émotion ne transparaissait sur son visage. Pandore faisait de même.

"Que fais-tu là louve de l'Eau ?"

Lança-t-il d’un ton neutre en penchant la tête sur le côté et en plissant à peine les yeux.

Puis, il entreprit de se lécher la patte, l’air pensif.
La noiraude ne broncha pas. Elle préférait rester de marbre pour le moment, le temps de comprendre un peu mieux à qui elle avait à faire. Certainement pas pour entamer un combat, ce n’était pas son genre, mais plutôt pour savoir si elle pourrait tirer de ce drôle de personnage des informations intéressantes. Elle était là pour ça, non ?
Le loup améthyste s’approcha lentement d’elle, balançant sa queue de gauche à droite, en position de chasse, un imperceptible sourire esquissé sur ses babines.

"On ne t'a pas appris à reconnaître les frontières de ton clan ?

Lui demanda-t-il d’une voix un peu plus froide à présent.

Tu pourrais très bien tomber sur une créature mal intentionnée... un démon ne ferait qu'une bouchée d'une petite louve comme toi."

Ajouta-t-il en ricanant, élargissant par la même occasion son rictus malveillant.

Il se redressa et effaça brusquement ce sourire, reprenant une attitude indéchiffrable.
Après s’être redressé, il demanda de nouveau à la sombre femelle :

"Et quel est ton nom ? Petite intruse ?"

*C’est bon, je vois le genre… Encore un qui se prend pour une terreur. Je crois que je suis en train de perdre mon temps avec lui, mais je vais quand même vérifier s’il ne serait pas au courant de quelques petites choses.*

Décida la ténébreuse espionne.

Elle prit enfin la parole, sur un ton indifférent, presque ironique :

« Ça fait beaucoup de questions d’un coup. La curiosité est un vilain défaut, tu sais ? Bon, tu me diras, c’est peut-être bien pour ça que j’en suis une grande adepte… Bref, trêve de plaisanteries. Ce que je fais là ? Je me balade. Les frontières ? Mon rang me dicte justement de les oublier, si tu vois ce que je veux dire. Une créature mal intentionnée ? J’en ai vu d’autres, ne t’en fais pas, je suis une grande fille maintenant. Et mon nom ? Quelle importance ? Mais bon, puisque tu y tiens, moi c’est Pandore. Ce serait trop te demander de te présenter aussi ? »

Puis, elle le fixa de son regard transperçant comme une lame de glace.
Le provoquait-elle ? Pas vraiment. C’était plutôt sa façon à elle de faire comprendre de manière implicite et subtile à son interlocuteur que ce n’était pas la peine de jouer au plus malin avec elle.

Spoiler:

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