Je n'en pouvais plus. Ma respiration était sifflante, mes pattes douloureuses et ma gorge sèche. Ah ! Je n'avais jamais autant couru de ma vie ! Et pourtant, j'étais bien obligé si je ne voulais pas finir sous les crocs de ce lion des montagnes ! Il me coursait depuis... Je ne sais pas, mais ça me semblait être une éternité. Et je ne pouvais pas voler non plus pour lui échapper, j'avais bien essayé mais je n'avais jamais vraiment entraîné mes ailes et du coup... Voler sur de longues distances étaient très durs voir impossible. Déjà que sur quelques mètres c'était fastidieux... Et la bête était agile, elle arrivait à me suivre même lorsque je me faufilai sous des buissons pour essayer de lui échapper. Qu'est ce que j'avais fait pour me retrouver dans une telle situation ? Je n'avais rien fait pour m'attirer de tels problèmes pourtant...


Comme d'ordinaire, je m'étais levé tôt pour effectuer un petit entraînement matinal seul, sans Bosco pour me permettre de travailler les enchaînements que je souhaitais. Non pas que la compagnie de mon ami me dérangeait, mais il était plus fort et nous n'avions pas les mêmes objectifs d'entraînement, c'etait donc plus compliqué. Tout cela pour dire que je partais donc seul pour m'entraîner. J'avais décidé de m'entraîner dans la Prairie Étoilée, comme souvent que je sois avec Bosco ou non. J'avais donc commencé par quelques enchaînements simples, avant de me décider à faire un peu de course, pour habituer mes pattes à avaler les kilomètres et à courir plus vite pour ma future voie, on était jamais à l'abri de devoir poursuivre une biche un peu trop fougueuse. Alors que je sautais par-dessus un amas de rochers, je fus surpris en atterrissant à sentir une surface molle sous mes pattes. Légèrement perplexe, j'arrêtais ma course pour me reposer et découvrir sur quoi j'avais sauté. J'aurais mieux fait de ne jamais me retourner. Lorsque je découvris un lion des montagnes que je venais de réveiller et qui commençait à cracher de colère en me regardant, les yeux brûlant de haine, je restais paralyser par la surprise et la peur qui commençait lentement à s'insinuer en moi. Le puma feula longuement, les poils hérissaient, avant de se jeter sur moi avec une haine et une rapidité qui ne pût que me déconcerter. Heureusement, mon pouvoir s'était mis en marche, créant une sorte de mur de flammes bleues qui stoppa net le félin et me permettant de décamper, prenant ainsi un peu d'avance. J'etais déjà essoufflé d'avoir utilisé mon pouvoir pour créer ce mur. Je n'étais pas habitué à créer des flammes aussi importantes d'un coup. Mais bon, ça m'avait permis d'échapper à une mort certaine. Et c'était déjà très.


Voilà comment je m'étais retrouvé à courir comme un dératé à travers toute la prairie étoilée. Et comme par hasard, je n'avais croisé personne susceptible de m'aider. Et, j'étais tellement désespéré que j'avais même traversé les frontières, et que je me trouvais sur le territoire des griffes de la terre. J'avais ressenti un certain malaise à franchir ainsi les frontières, mais j'étais bien obligé si je ne voulais pas finir entre les griffes de mon poursuivant. Je ne connaissais pas trop les terres des autres clans, j'étais dans un endroit verdoyant ou il était plutôt difficile d'avancer tant il y avait d'arbres. Heureusement que j'étais encore petit et plus agile... Tout comme le puma qui ne semblait pas plus gêne que cela par les imposants végétaux.

Mes pattes étaient de plus en plus lourde, j'avais l'impression de ralentir, à moins que ce soit le lion des montagnes qui me rattrape... Lui, ne semblait même pas fatigué, sa colère semblant lui donner une énergie infinie. Et puis qu'est ce qu'il faisait sur les terres de l'eau ? Un puma ça vit dans les montagnes non ? La faim avait du le faire venir jusque sur les terres des loups... Il poussa un rugissement sauvage, me nouant l'estomac. Je devais trouver une solution. Courir ne mènerait à rien, surtout que je fatiguais, vite, car oui, j'avais oublié de préciser que le sol était recouvert de neige, rendant ma course encore plus ardue. Et si je grimpais à un arbre ? Les lions des montages étaient certes agiles mais je pouvais très bien le stopper en créant mes flammes. Prenant une grande inspiration et l'arrachant une grimace, je puisais dans mes dernières réserves pour bondir sur l'arbre le plus proche, m'accrochant à l'aide de mes griffes à l'écorce glissante, et commençai mon ascension. Je m'aidai de mes ailes pour avancer plus vite, et finalement atteindre une branche assez robuste pour supporter mon poids. Le puma essaya aussitôt de me rejoindre, mais je le stoppai en créant des flammes autour du tronc, stoppant le félin qui cracha de frustration. Il se mît alors à tourner autour de l'arbre, attendant certainement que les flammes disparaissent, ce qui n'allait pas tarder, cela m'épuisait, je n'étais pas habitué à utiliser ainsi mon don. Le souffle court. Je me mis à crier du plus fort que je pus :


Je m'en voulais d'avoir été si imprudent en partant ainsi seul à la prairie étoilée. Si Bosco avait été avec moi... Je grognai, me jurant que plus tard, je tuerai tout lion des montagnes se dressant sur mon chemin d'un coup de croc.

Premier mouvement léger, souple et détendu

Crépitements légers, mouvement doux du sol.

Deuxième mouvement rapide, centré en un point précis

La terre ondule, se craque, devient une plaque instable.

Troisième et dernier mouvement, puissant et sans hésitation. A effectuer de toutes ses forces.

Le sol poussa un gémissement, puis se mit à vibrer. Lisha raffermit sa prise, les griffes profondément enfoncées dans la terre. Elle serra les dents, se concentra du mieux qu'elle pouvait. Le tremblement s’accentua, puis commença à fluctuer. Lisha sentit un léger pincement sur ses coussinets, et poussa un grognement mécontent. Le sol cessa de bouger, mais resta dans un état pitoyable. Les racines des arbres avaient été arrachées, les pierres enfoncées six pied sous terre étaient remontée à la surface et le sol était parcouru de fractures profondes. La jeune louve regarda sa patte avec mépris. Du sang coulait de diverses coupures, colorait la terre d'écarlate.

-Putain ! Cracha-t-elle

Cela fessait des jours qu'elle tentait de mettre au point une nouvelle technique reproduisant un séisme. Soit, elle fessait des progrès considérables, mais elle n'était pas capable de blesser qui que se sois avec une attaque qui détruit seulement le sol et la nature. Le pire dans tout ça, c'est que plus elle utilisait son pouvoir, plus ses pattes se couvraient d'écorchures douloureuses qui saignaient pendant de longues minutes. Lisha était en rage, d'une humeur atroce. Il fallait qu'elle se détente à tout prix. Le problème, c'est qu'à chaque fois qu'elle se lançait dans ses séances de relaxation et de concentration, il fallait qu'on vienne la déranger. Elle avait fini par négliger cette partie de son entraînement, et elle se rendait compte aujourd'hui qu'elle n'aurait pas dû.

Elle s'éloigna de la désolation qu'elle avait causée, et elle se dirigea vers un grand arbre, surement vieux de plusieurs centaines d'années. Lisha était d'origine une louve très souple et agile, et pour contrer le pouvoir de son mentor, qui est de ressentir toutes les vibrations du sol, elle avait appris à se déplacer dans les arbres, et à y grimper. Elle s'était rendue compte par la suite que cette aptitude ne lui servirait pas à grand chose, puisqu'elle ne comptait en aucun cas se battre avec Blake. Mais elle y avait pris goût... Elle ne se lassait jamais de la puissance du vent dans les hauteurs, de l'agilité et de la souplesse dont elle devait faire preuve pour éviter de tomber,... Mais ce qu'elle aimait le plus, c'était le fait qu'elle se sentait plus proche des étoiles.

Lisha grimpa sur une branche basse puis commença son ascension. Elle atteignit rapidement une branche centrale très épaisse, où elle s'assit et ferma les yeux. Elle profita de ce long instant de silence, respira profondément l'air sucré de la Jungle. Elle se coucha, puis doucement sombra dans le sommeil sans en avoir conscience...

****

Elle entendit du bruit, puis sentit une odeur étrange.

"Au secours ! Quelqu'un vite !"

Lisha s'éveilla en sursaut, se sentit basculer dans le vide. Elle s'accrocha de justesse à la branche avec ses griffes, l'arrière train pendant mollement dans le vide. Elle baissa les yeux et vu des volutes bleues au sol. Elle vu ensuite une masse de fourrure au pied de l'arbre puis elle détecta la provenance du cri. Elle poussa un grognement terrifiant, celui réservé aux moments où elle était d'une humeur abominable.

-Non mais ça va pas de crier comme ça espèce d'imbécile !!! Pestiféra-t-elle.

Elle le foudroya de son regard doré avant de porter un peu d'attention au félin qui rugissait en dessous. Lisha s'entraînait ici tout les jours et elle avait déjà eu à faire à divers félins -Il y  en avait beaucoup qui vivaient ici- mais elle préférait les éviter que de les affronter. Le louveteau avait l'air absolument épuisé, et la louve de la terre était admirative qu'il puisse maintenir son pouvoir aussi longtemps.

-Arrête avec ton feu, les félins en ont peur, mais la peur augmente l'agressivité...

Elle se issa sur sa branche, puis descendit le long du tronc avec sa souplesse habituelle. Elle posa les pattes sur la branche où le louveteau se tenait, l'attrapa par la peau du cou, et regrimpa sur le tronc. Elle n'eut aucun mal à remonter jusqu'à sa branche, où elle posa le jeune loup. Lisha regarda en bas.

-Les lions grimpe très mal aux arbres, il ne pourra jamais atteindre cette branche.

Elle se coucha, penchée au dessus du vide, sans sembler éprouver le moindre vertige. Elle poussa un grognement exaspéré.

-On est coincé ici pour quelque temps...

Le cœur tambourinant fort dans ma poitrine, le souffle toujours aussi court, je restai paralysé sur ma branche, à observer le félin, tournant autour du tronc d'arbre, attendant que je sois assez fatigué pour ne plus pouvoir faire apparaître mes flammes. Ce qui n'allait pas tarder. Mes pattes étaient tremblantes, à tel point que j'avais du mal à tenir sur ma branche, je n'en pouvais plus. Mais entendre le puma gronder furieusement juste en dessous de moi me donnait une énergie désespéré à rester cramponné à l'écorce, à laisser ces flammes bleutées continuaient de briller. Quand, soudain, j'entendis quelque chose grogner, juste au-dessus de moi, ainsi qu'une voix sifflante pestant que j'étais un imbécile. Mais j'étais tellement épuisé... Les mots avaient à peine atteints mon cerveau. Mon pelage était hérissé, et encore plus lorsque je sentis que quelque chose se hissait à côté de moi. Je sursautai quelque peu avant de tourner avec nervosité ma tête, et de voir une louve, au pelage brun et un peu plus âgée que moi désormais à côté de moi sur la branche. Elle avait de grands yeux dorés et une mèche brune qui barrait une partie de son museau fin. Était-ce elle qui m'avait injurié ? Je n'en avais aucune idée.


Tremblotant, je hochai lentement la tête, mais avant d'avoir pu faire disparaître mes flammes, la louve m'attrapa par la peau du cou comme le faisait autrefois ma mère, ce qui eut comme conséquence de me faire horriblement rougir de honte tandis qu'elle me hissait sur une branche bien plus haute ou il m'aurait été impossible d'y accéder seul. Une fois installé et un peu plus confiant, je me mis à diminuer peu à peu mes flammes, jusqu'à ce qu'elles disparaissent totalement. Je poussai un petit soupir, ayant cette pression envolée, je me sentais soudainement plus léger. Nerveux, je jetai un coup d'œil au lion des montagnes qui continuait de feuler furieusement, en bondissant sur le tronc de l'arbre, plantant ses griffes énormes dans l'écorce, traçant de profonds sillons. Mais comme l'avait si bien dit la louve, il n'arrivait pas à hisser à notre hauteur. Pour un animal vivant normalement dans un terrain accidenté c'était étonnant, mais quel soulagement...


La louve brune s'allongea sur la branche, les pattes pendantes dans le vide, elle débat avoir l'habitude pour être aussi à l'aise. Quant à moi, je restai près du tronc, les griffes plantées dans l'écorce, raide comme un piquet, tout sauf à l'aise. Enfin, j'étais tout de même un peu plus confiant car mon souffle commençait à s'apaiser, j'avais toujours les pattes tremblantes mais je pouvais respirer un peu plus aisément. C'était certainement la pire journée de ma vie... Me voilà coincé sur un arbre en compagnie d'une louve que je ne connaissais pas avec au pied du dit arbre un lion des montagnes qui n'avait comme idée que me dévorer et en plus, je n'étais pas sur les terres ! Si un guerrier arrivait, j'étais bon pour me faire arracher la fourrure. Je baissais les oreilles, honteux, comment réagirait mon père s'il apprenait où j'étais ?


Je me mis à gronder, furieux contre moi-même. Furieux de mon incompétence, furieux de ma faiblesse, furieux de ma stupidité ! Ça m'apprendra à vouloir jouer les grands apprentis à m'entraîner seul. Il me fallait un mentor, mais j'étais encore trop jeune pour que quelqu'un m'accepte. Et ça, ça m'agaçait réellement. Les oreilles rabattues en arrière, le regard sombre, j'étais comme coupé du monde, perdu dans mes sombres pensées à me sermonner tout seul de ma stupidité. Je secouai la tête, tout en grognant.


Je me mis à observer les alentours, essayant de trouver une solution. L'arbre ne portait aucun fruit puisque nous étions en hiver mais, il gardait ses feuilles, ce qui pouvait être utile. Me relevant un peu en m'appuyant sur le tronc, je me mis à arracher quelques branchages à l'aide de mes crocs. La bouche pleine d'écorce et de feuilles, je me penchai un peu en avant, observant le puma qui me regardait également de ses yeux froids. Fronçant les sourcils et soudain animé d'une nouvelle flamme, je commençai à lancer mes projectiles végétaux sur le félin. Ce dernier se mît à reculer tout en feulant de colère. Si je m'étais trouvé sur un pin, il aurait été bien plus simple de le faire fuir à l'aide de pommes de pins. Mais bon, faisons avec les moyens du bord, j'espérais vraiment que cela ferait fuir le puma.

Le louveteau commença à vociférer, parler de son père, parler au lion,... Il s'est même parlé à lui même. Lisha roula les yeux tentant vainement de ne pas écouter les paroles intempestives du petit qui lui grillait les oreilles. Il se mis à grogner contre lui-même, et la louve brune trouva ça presque mignon. Soudain il se mit à arracher les belles feuilles de l'arbre, ses branches et son écorce. Il balança tout ce qu'il trouvait sur l'animal, dont la rage grimpait de plus belle. Lisha se leva, avança d'un pas furieux vers le louveteau. Elle le plaqua contre le tronc, une étincelle de rage brillant dans ses yeux.

-Comment ose tu détruire ce que cet arbre a mit des années à construire ?! Tu lui arrache les parties de son être sans te rendre compte qu'il est bien vivant ! Tu ne crois pas que tu en as déjà assez fait ?! Vous êtes vraiment irrespectueux, on ne vous apprends même pas à respecter la vie !

Elle relâcha le louveteau et se détourna.

-La prochaine fois c'est moi qui t'arracherais des touffes de poils et des dents. Lança-t-elle d'une voix sombre.

Elle regarda le lion feulant en bas et soupira. Il était vrai que ce petit devais sûrement rentrer chez lui, que aucun lieu n'était sûr. Elle s'assit, respira un grand coup.

-Bon, bon... Je vais descendre et je vais faire partir le lion, comme ça tu pourras rentrer chez toi.

Elle sauta par dessus le louveteau pour atteindre le tronc, puis se laissa glisser jusqu'aux branches plus basses. Elle regarda le lion qui lui montra les dents. Elle se mit en position de combat, et elle se mit à grogner férocement. Il se toisèrent du regard pendant un certain temps, puis la terre se mit à frémir sous les pattes du félin. Le vibremment s'accentua, puis le sol se mit à bouger d'une façon tout a fait inédite. Le lion commença déjà à reculer, apeuré par les roulements de la terre. Lisha en profita pour sauter sur le sol. Il était beaucoup plus facile pour elle de manipuler son élément si elle était en contact avec celui-ci. A partir de là, d'étranges vagues se formèrent, et se dirigèrent vers le lion. Il continua de reculer, car la terre mole venait s'écraser contre lui. Puis il partit d'un pas lent, en poussant des feulements de rage. Lisha le regarda s'éloigner, puis leva la tête vers la branche où elle avait laissé le louveteau.

-J'imagine que si tu n'as pas su monter, tu ne saura pas descendre non plus...

Et elle remonta, grimpant sur le tronc et les branche comme un chaton, avec des gestes parfois assurés, et parfois hésitants. Elle attrapa le louveteau par la peau du cou et se laissa glisser jusqu'au sol. Elle le posa, puis s'étira. Elle en avait marre de sauver tout les loups qui venaient dans cette Jungle...

Est-ce que je me serai attendu à ce que la louve se jette littéralement sur moi pour me plaquer contre le tronc de l'arbre, ses yeux brillants d'une colère noire ? Certainement pas. J'avais même été plutôt surpris, mais la fatigue était telle dans mon corps comme dans mon esprit que j'avais on peut dire, aucunement réagi. Je me sentais vidé aussi vivant qu'une poupée de chiffon. Les paroles pleines de menaces de la louve glissaient sur ma fourrure, comme le ferait le vent. Oh bien sur, je pouvais comprendre sa réaction même si elle était un temps soit peu exagérée mais je préférais ne rien répliquer, elle était plus grande que moi donc plus entraînée et il ne fallait pas oublier que j'étais sur ses terres, pas sur les miennes. Et mon cerveau n'était pas assez éveillé pour pouvoir rétorquer quelque chose d'intelligent. Las, je me mis à soupirer, glissant sur le tronc, comme incapable de porter mon propre poids alors que la louve brune venait de me relâcher.


Je fermai les yeux, pas plus atteint par ces mots que ceux d'avant. J'étais épuisé, même réfléchir s'avérer être une tâche difficile. Mais les paroles de la louve qui suivirent réussir tout de même à me faire ouvrir les yeux et dresser les oreilles. Descendre attaquer le lion des montagnes ? Oui, c'était une bonne idée. J'entendis ses pattes crisser sur l'écorce et je la vis, face au puma qui feuler avec rage tandis qu'elle grognait avec force. Et ce qui suivit, ne pût que m'étonner. Je m'attendais à ce que la louve brune attaque le félin et le morde assez fort pour le faire fuir mais elle ne fit rien de cela. Semblant se concentrer, la terre se mît peu à peu à rouler sous les pattes du puma comme des vagues de terre. L'animal feula de plus belle en reculant, semblant apeurer par les mouvements du sol, jusqu'à ce qu'il disparaisse dans le manteau de verdure. À ce moment, je sentis un profond soulagement, je pouvais enfin rentrer. J'essayai de me remettre sur mes pattes, ce que je réussis tant bien que mal, mais il fallait maintenant que je descende l'arbre. Pensant d'abord à utiliser mes ailes, j'eus peur qu'à cause de la fatigue, je ne puisse me soulever dans les airs, j'étais donc coincé.


Je hochai légèrement la tête pour confirmer ses dires et la louve remonta le tronc de l'arbre aussi agile qu'un chat pour me faire descendre, me tenant par la peau du cou comme le ferait une mère et son louveteau ce qui eut pour conséquence de me faire rougir... Heureusement que mon pelage cachait cela, c'était assez humiliant de se faire porter comme un louveteau. Une fois à terre, un soupir de soulagement s'échappa d'entre mes babines, le plus dur était passé. Je jetais un coup d'œil à la louve brune qui s'étirait, et je l'imitai dans l'espoir de m'éveiller un peu. Il ne fallait pas trop que je tarde sur ces terres  mais... Est-ce que je pourrai faire le voyage retour ? Déjà que l'allée avait été épuisant... Je soupirai, à nouveau, fatigué.


C'est vrai qu'au départ, si ce lion des montagnes m'avait poursuivi jusqu'ici, c'était parce que j'avais eu le malheur de le réveiller en améliorant mon endurance et ma vitesse à la course. Enfin, j'avais bien tenu tout de même, mais il serait difficile de retourner sur les terres de l'eau à la même allure. Résigné, je reportai mon attention sur la louve brune. Même si elle n'avait pas été des plus... Aimables avec moi, elle m'avait tout de même, sauvé la vie, on peut dire ça. Je m'approchai d'elle, essayant de ne pas trop laisser paraître ma fatigue et dit :


Je m'arrêtais là, soudainement conscient que je venais de lui poser plusieurs questions d'un seul coup comme le ferait un louveteau un peu trop curieux. Je baissais mes oreilles sur mon crâne, et me raclai la gorge pour retrouver un peu consistance, ne sachant que serait la réaction de la louve.


Je balayai le sol de ma queue, gêné.

Lisha se demanda si le louveteau allait partir, ou rester encore un peu à papoter. Au fond, cela ne la dérangeait pas du tout. Elle s'ennuyait à force de rester toute seule à s'entraîner.

"Merci... De m'avoir sauvé. Et désolé de t'avoir certainement dérangé... Mon nom est Kagy, futur chasseur... Toi tu es certainement une guerrière, et quel est ton nom ? Et c'était très impressionnant que tu as fait avec la terre. C'est ton don ?"

Lisha allait gentillement répondre à toutes ses questions, mais le petit baissa les oreilles et se racla la gorge. Elle se rappela de sa réaction de tout à l'heure, qui était un peu excessive. Mais elle détestait que l'on arrache ses si jolis arbres pour rien.

"Excuse moi, je dois paraître si gamin à poser tant de questions comme le font les louveteaux..."

Elle sourit et hocha de la tête.

-Tu es un louveteau, alors il n'y a pas de mal à ça. De toute façon j'aime bien qu'on me pose des questions, et j'aime bien y répondre aussi. C'est ainsi que l'on apprend des tas de choses.

Elle s'assit sur le sol, et claqua de la langue. C'était un vilain tic qu'elle avait attrapé lorsqu'elle réfléchissait trop. Maintenant, elle le fessait souvent, au point de ne même plus le remarquer.

-Je m'appelle Lisha, et je suis bien une guerrière du Clan de la Terre. J'ai aussi le don de manipuler la terre, mais ce que tu as vu, ce n'était pas grand chose. J'ai toujours su faire ça, depuis que je suis louvette. Et puis tu n'as pas à me remercier, j'ai l'habitude. Il y a des tas de loups qui se perdent ici, et même dans le Clan de la Terre, peu connaissent le moyen de sortir de cette Jungle.

Elle fixa Kagy avec ses yeux dorés brillant de malice. Puis elle éclata de rire. Un rire frais, doux, qu'il en aurait été presque contagieux.

-Je me demande bien comment tu t'es retrouvé avec un félin collé au cul ! Tout le monde sais qu'il ne faut pas se frotter à des bestioles pareilles ! Et qu'elle idée stupide de venir se fourrer ici ! C'est le territoire des félins, il y en a partout ! Tu as de la chance qu'un autre ne soit pas venu te poursuivre en plus !

Elle continua à rire quelques secondes, puis se calma pour écouter la réponse de Kagy...

Contrairement à ce qu'elle avait montré jusque-là, cette louve était plutôt sympathique, avec son grand sourire et ses yeux dorés pétillants, elle n'avait rien à voir avec l'image qu'elle m'avait montré quelques instants plus tôt. Enfin, je suppose que c'était parce que j'avais "agressé" son arbre en arrachant ainsi écorce et feuilles pour les jeter sur le lion des montagnes qui avait désormais disparu. Mais bon, c'était passé maintenant, et elle était beaucoup plus sympathique ainsi à répondre gentiment à toutes mes questions. La louve répondit à mes questions, d'une voix plus légère qu'avant, m'indiquant que je sois si curieux ne la dérangeait pas plus que cela. J'appris qu'elle était guerrière, des griffes de la terre, mais ça, je m'en doutais déjà. Pour qu'elle se trouve ici, qu'elle puisse maîtriser les mouvements du sol et avoir cette odeur, elle ne pouvait qu'être des griffes de la terre et son nom était Lisha, un joli nom selon mon avis.

Soudain fatigué en sentant toute la tension que j'avais accumulé se dissiper peu à peu, je baillai, essayant d'être discret pour ne pas paraître impoli et m'allongeai dans l'herbe verte. Cet endroit semblait épargné de la neige, les arbres devaient protéger l'endroit en grande partie. C'était plutôt agréable de sentir autre chose que de la neige sur son pelage, comme le chatouillement de l'herbe. Comme quoi, le printemps finirait bien par revenir, l'hiver ne serait pas éternel. Je m'étirai rapidement les pattes avant, pour essayer de m'éveiller un peu. J'étais certes fatigué mais m'assoupir en pleine discussion avec un loup sur d'autres terres en plus, ce n'est pas ce que l'on peut appeler le comble de l'élégance.


Elle s'était mise à rire. Légèrement embarrassé, je souris tout de même, soudain conscient que la situation pouvait vraiment être risible. Enfin, pendant cette course poursuite, je n'avais pas vraiment cherché à savoir où je me dirigeais; je voulais juste échapper aux griffes du puma, c'était tout ce qui m'importait, savoir où j'allais n'était pas ma préoccupation première il y'a encore quelques instants. Les oreilles s'agitant doucement, je répondis finalement à Lisha d'une voix légère tandis qu'elle continuait de rire :


Je souris en émettant un petit rire, balayant une énième fois le sol de ma queue. J'avais mal aux pattes mais bon, d'une certaine manière, on pouvait considérer cela comme un entraînement. J'aurai certainement des courbatures pendant plusieurs jours mais cela ne pouvait que me faire du bien. Enfin, si j'avais eu un mentor, cela ne me serait jamais arrivé. Mais "je suis encore trop jeune, je dois attendre d'être un adolescent pour avoir un réel apprentissage je devais me montrer patient." Combien de fois j'avais entendu cette phrase ? Ça me rendait fou ! Quand je pense que certains avaient un mentor dévoué et se foutaient royalement de leur formation, ça me m'était en rogne. Moi j'étais motivé et on me jugeait trop jeune, le système était quand même on peut dire, un peu mal foutu. Je rabattis mes oreilles en arrière, et décidai de continuer la conversation pour faire part de mon opinion.


Je grondai silencieusement avant de poser ma tête sur mes pattes, soudain plus fatigué encore. Je me mis à bailler le regard divaguant vers l'horizon. J'avais tellement hâte d'être un adolescent, d'avoir enfin un mentor, et une vraie formation. Même si j'essayais de m'entraîner comme un vrai guerrier, je voulais devenir chasseur... Mais pas où commencer ? Je ne pouvais apprendre l'art de la traque seul comme je m'entraînais à courir ! Je soupirai.

"Au départ je m'entraînais simplement. Je courais un peu histoire de gagner en endurance et j'ai malencontreusement réveillé le puma. Et il m'a coursé des terres de l'eau jusqu'ici, autant dire que je n'ai pas vraiment réfléchi où j'allais, je voulais juste m'en débarrasser !"

Kagy rit de sa propre histoire, et la louve de la terre se dit que c'était finalement un bon petit gars. Elle aussi s'était déjà fait courir après un félin de ce genre, mais elle était en terrain connu, et elle avait pu s'en sortir grâce à ses réflexes innés. Elle sourit en se rappelant de tout ça.

"Si j'avais eu un mentor, j'aurais pas eu ce problème. Mais on me dit que je suis trop jeune, pendant que d'autres s'entraînent sans aucune motivation... Ça me rend fou ça !"

Lisha porta un regard intéressé aux paroles du petit Kagy. Trop jeune ? Elle doutait que ce soi une raison fort valable. A son âge, Lisha avait déjà un mentor depuis plusieurs mois. D'ailleurs elle connaissait très peu de louveteaux ayant été acceptés comme apprentis à un si jeune âge. Et pourtant Blake et elle avaient toujours trouvé des choses à faire, à perfectionner, même si cela différait du combat. Lisha apprenait vite, et avait de bonnes bases sur lesquelles compter.

"J'ai tellement hâte de grandir et d'avoir enfin un mentor..."

Lisha se leva, et souleva Kagy pour le mettre en position assise. Elle appuya sur son torse pour qu'il se mettre bien droit, puis elle s'assit devant lui. Elle lui adressa son doux sourire, qui était capable de faire fondre n'importe qui.

-Tu n'es pas si petit que ça ! Tu sais à ton âge, j'avais déjà un mentor depuis longtemps. Je me suis liée avec lui très jeune, et j'arrive seulement à la fin de ma formation. Le temps de l'adolescence est trop court pour pouvoir apprendre toutes les bases plus la maitrise de son pouvoir. Et il est clair que plus on apprend jeune, plus on développe ses capacités.

Elle se leva, et les perles de ses jolies tresses s'entrechoquèrent avec un bruit de clochette. Elle regarda dans le lointain, puis tourna ses deux yeux dorés vers Kagy.

-Si tu veux, je peux t'apprendre quelques bases. Bien que ma formation ne soit pas terminée, et qu'on n'appartienne pas au même clan, je veux bien t'aider.

Elle lui tendit sa patte brune foncée mouchetée, comme pour lier un contrat. Elle lui fit son plus beau sourire.

-Alors ? Qu'en dis-tu ?

Alors que je morfondais, déballant les malheurs et problèmes de pré adolescent à voix haute, Lisha s'approcha de moi et m'obligea à m'asseoir. Elle me redressa pour que je me tienne bien droit et je la laissai faire, fronçant légèrement les sourcils, attendant de voir pourquoi elle voulait que j'adopte une telle tenue. La louve brune s'assit ensuite face à moi et me sourit. Perplexe je lui rendis tout de même son sourire, ne voulant pas paraître froid, même s'il n'était pas aussi chaleureux que le sien. Je préférais attendre de voir ce qu'elle me disait avant de lui offrir un réel sourire.


Dressant les oreilles, je la regardais quelque peu étonné, qu'est ce que j'aurai voulu trouver un mentor aussi jeune qu'elle ! Mais personne ne voulait encore m'accepter, on pouvait dire qu'elle avait eu de la chance de trouver un mentor. En plus elle avait raison, l'adolescence était trop courte pour devenir le meilleur, c'était pour cela que je m'entraînais et que j'essayais désespérément de trouver un mentor, en vain. Lisha se leva ensuite, le bruit des perles décorant ses mèches brunes accompagnant ses pas. Je choisis ce moment pour lui répondre :


La louve brune tourna ses yeux vers moi, m'observant comme-ci elle allait dire quelque chose d'important ce qui éveilla encore une fois ma curiosité. Droit comme un piquet, le regard rivé sur elle, j'attendais qu'elle s'exprime, les oreilles dressées sur ma tête, la queue fouettant l'air.


Et elle me tendit sa patte en souriant. J'ouvrais la bouche, puis la refermai, ne sachant que dire. Les yeux écarquillés, ma première pensée fut d'accepter aussi sec, mais je me ravisai, préférant réfléchir avant d'accepter. Sa proposition était fort alléchante, et avoir un mentor, même non officiel et temporaire, c'était une occasion inespérée. Mais il y'avait un problème que Lisha avait elle-même soulevé, nous appartenions à deux clans différents. Je n'avais, pour ainsi dire, jamais quitte nos terres, ma présence dans cette jungle étant une pure erreur, alors devenir l'apprenti d'un loup ennemi... Si mon père l'apprenait... Mais cela me permettrait de me perfectionner, d'apprendre d'autres techniques. Et puis... Si personne n'était au courant, cela ne faisait de mal à personne... Non ? Partagé, je me dandinai d'une patte sur l'autre, pesant le pour et le contre jusqu'à ce que, à la fois débordant de joie, et légèrement inquiet, je pris une petite inspiration, tendis ma patte à la louve, et :


Au plus profond de moi, j'avais envie de bondir comme un fou de partout et d'hurler ma joie sur tous les toits, mais je préférais rester calme et sérieux pour donner une bonne image à Lisha, qui était maintenant ma mentor. Enfin. Un frisson parcourut mon échine tandis qu'un léger et irrépressible sourire se dessinait sur mes babines. Je le redressai, la queue en panacha, et, d'une voix légère dit :


Simple question, j'avais envie de tout apprendre en une journée. L'attaque, la parade, la vitesse, la force, l'endurance. Tant de possibilités, maintenant...

Kagy réfléchit quelques instant, puis il tendit sa patte à Lisha, qui la pris sans aucune hésitation.

"C'est d'accord."

Elle sourit, et sentit un étrange sentiment se glisser dans son coeur. Elle venait d'accepter de guider un louveteau, sans avoir même finit son propre apprentissage. Elle savait que même si cet enseignement allait être temporaire, elle venait de se lier pour toujours avec Kagy.

"On commence quand ?"

Lisha ferma les yeux un instant, se rappelant d'une phrase qu'elle avait dit quand Blake l'avait accepté. On commence par quoi ? Elle se rappela de l'envie d'apprendre qui l'avait submergée ce jour là. Elle sourit à Kagy.

-Tout de suite.

Elle se leva, et se mit à trottiner.

-Allons, dépêche toi. Cet endroit n'est pas idéal pour s'entraîner. On va courir jusque là bas pour s'échauffer.

Elle s'adapta au rythme du louveteau, mais gardait toujours une légère avance sur lui, pour clairement lui montrer qu'il n'était pas prêt d'en finir pour arriver à courir aussi vite qu'elle, et aussi longtemps. Elle prit aussi en compte le fait qu'il avait déjà beaucoup couru aujourd'hui, donc elle choisit un parcours court. Elle examina Kagy pendant toute la durée de la course, et trouva dééjà des défauts à rectifier. Ils arrivèrent vite à la clairière que Lisha avait choisie pour travailler. Elle s'arrêta, sans être le moins du monde essoufflée.

-Et bien, il y a du travail ! Mais bon, passons pour l'instant. J'ai deux questions essentielles à te poser. Elle attendit quelques instants, puis reprit. En quoi consiste ton pouvoir ?

Elle s'approcha de Kagy, et pris une de ses ailes entre ses pattes.

-Et sais tu voler ?

Elle était particulièrement intriguée par ses jolies ailes qu'il portait sur le dos. Il ressemblait à un dragon avec ça. Lisha avait toujours eu envie de voler, et avoir un élève que en était capable l'enchantait...

Légèrement surpris, je dressai les oreilles, mes pattes étaient fatiguées, j'avais l'impression que si je faisais encore un pas je m'effondrerai ! Mais je n'avais plus le droit de rétorquer, j'avais accepté de devenir son apprenti, j'étais même obligé d'exécuter tous ses ordres. Essayant de ne pas montrer ma fatigue, je la suivis accélérant lorsqu'elle m'empressa. J'allais avoir un réel entraînement. Enfin. Soudain ragaillardi, j'accélérai, même si elle restait devant moi, alors que je courais presque elle, elle trottinait. Notre petite course dura une bonne dizaine de minutes. J'avais mal aux pattes, j'avais de nombreuses fois trébuché, mais je ne m'étais pas plein une seule fois, je voulais montrer à Lisha que je pouvais endurer la "douleur" ou plutôt l'effort. Enfin, j'ai tout de même poussé un petit soupir lorsque nous nous sommes arrêtés, déjà fatigué de ma cavalcade matinale. Je m'assis, essayant de ne pas laisser paraître ma fatigue alors que ma mentor ne semblait même pas essoufflée.


Sa première remarqua me fit quelque peu tiquer, pour ne pas dire vexer. Je pensais tout de même avoir quelques capacités à force de m'entraîner tout seul mais apparemment non. Enfin, je ne fis aucune remarque, préférant faire comme-ci de rien n'était et me concentrai plutôt sur sa question. Je lui souris et me relevai, m'approchant d'un rocher émergeant du sol. Me plaçant en face de lui, je me concentrai pour faire sortir mes flammes, j'étais sur qu'avec de la concentration, je pourrai assez refroidir la pierre pour créer de la glace. Mais j'étais trop épuisé et je dus éteindre mon feu avant d'avoir pu atteindre une température assez basse. Je me tournai ensuite vers Lisha, m'assis bien droit et déclarai :


La guerrière s'approcha ensuite de moi et prit de patte une de ses ailes, ce qui me fit un peu frissonner. Je n'aimais pas trop que l'on manipule mes ailes, j'avais du mal à m'en servir et j'avais toujours peur que la membrane se déchire à cause d'un choc trop dur ou que les articulations se brisent à cause d'une mauvaise manipulation. J'angoissai peut-être pour rien mais cela me faisait un peu peur.


Je ne mettais jamais vraiment servi de mes attributs d'oiseau par manque de temps et d'envie. Certains rêveraient de voler, je ne voyais pas trop ce que cela avait d'attrayant, même si cela pouvait être utile. Reportant mon attention sur Lisha, je déclarai :


Marquant un temps de pause, je me mettais alors en position de combat, la queue s'agitant puis reprit :

Il expliqua le principe de son pouvoir, et il précisa aussi qu'il était incapable de l'utiliser pour grand chose pour le moment. Finalement arriva le moment il parla de ses ailes. Il expliqua à Lisha qu'il ne savait pas voler, mais qu'il pouvait trouver quelqu'un pour lui apprendre. Lisha continua de l'observer encore quelques instants, puis le louveteaux se leva, et adopta la posture de combat typique au louveteaux.

"On commence par quoi alors ? L'attaque ? La défense ? Les deux ?"

Lisha rit intérieurement. Elle ressemblait tant à ce louveteaux avant. Des phrases identiques sortaient de sa gueule à son âge. C'était presque effrayant. Vue de l'extérieur, elle se contenta d'afficher un petit sourire.

-Ni l'un, ni l'autre. Tu es fatigué et tu ne pourras pas te donner à fond. Commencer un entraînement fatigué est inutile. De toute façon j'ai quelques choses à t'expliquer avant de commencer quoi que ce soit.

Elle s'assit en face de lui, et lui demanda avec le regard de l'imiter.

-Tu n'es pas un mauvais coureur, au contraire. Tu as une bonne endurance, et tu sais gérer ta course comme il faut. J'ai prit en compte le fait que tu avais déjà beaucoup couru avant, et sur ce point je suis satisfaite pour le moment. Par contre, tu es si indiscret que les animaux t'ont repéré à une lieu d'ici. C'était vraiment mauvais. C'est là que tu as besoin d'aide pour le moment.

Elle fit une pause pour remettre une tresse qui lui tombait devant les yeux.

-Je ne suis pas une chasseuse, autrement dit, je ne peux pas t'apprendre à chasser. Mais je peux faire de toi quelqu'un de discret, concentré et réfléchit. Si tu veux apprendre l'attaque ou la défense c'est ton mentor chasseur qui te l'apprendras. Allons, fessons un exercice.

Elle désigna la clairière en long et en large, puis fixa Kagy avec ses grands yeux jaunes.

-Je vais rester ici, assise et les yeux fermés. Toi, tu vas allez là-bas, près du grand arbre. Puis tu vas essayer de m'approcher sans que je puisse te détecter. Si je t'entends, je te désignerais avec ma patte et si je t'ai trouvé, tu auras perdu. Puis nous ferons l'inverse. Tu as compris ?

Elle ferma les yeux, et attendit sagement que le louveteau se place. Puis elle tendit ses oreilles et écouta chaque bruit avec attention. Elle avait pratiqué cet exercice des centaines de fois avec Blake, et elle était forte. Très forte. Il ne lui fut que quelques longues secondes pour trouver le bruit du pas feutré. Elle désigna de la patte l'endroit d'où provenait le bruit. Elle ouvrit les yeux et sourit.

-Recommence. Tes pas doivent être beaucoup plus léger.

Puis elle referma les yeux.

Je baissai les oreilles et la queue légèrement dépité. Même si c'est vrai que j'étais fatigué et que j'avais mal aux pattes, j'aurai bien aimé commencer directement. Essayant de ne pas trop montrer ma frustration, je m'asseyais, la queue ramenée devant moi, me tenant bien droit, attendant avec une certaine impatience ce qu'allait me dire Lisha. Mes oreilles s'agitaient avec énergie, trahissant d'une certain manière mon excitation. Je n'eus pas à attendre longtemps puisque ma mentor reprit très rapidement :


Malgré la "critique" j'étais plutôt content de son semi-compliment et souris en opinant de la tête. C'est vrai que je n'avais pas vraiment fait attention à me déplacer silencieusement ou pas, je ne l'avais même jamais fait. En tout cas, j'avais quand même quelques qualités selon la louve brune et ça réchauffait le cœur ! Il ne me restait plus qu'à développer ma discrétion, ça me serait très utile à la chasse, les lapins n'auraient même pas le temps de lever la tête qu'ils seront déjà sous mes crocs ! J'eus un sourire à cette rêverie, rêverie qui ne dura pas plus longtemps puisque Lisha s'exclama à nouveau :


Je me plaquai au sol, mimant de pister une proie, avant de bondir, donner un coup de patte dans l'herbe comme on le ferait sur un lapin pour l'assommer et de retomber en mordant l'herbe comme j'aurai mordu la nuque du rongeur. Je retombai tout de même un peu maladroitement, les pattes douloureuses. Je reportais ensuite mon attention sur ma mentor, pour voir quel genre d'exercice nous allions faire. Je me rassis donc, pour me calmer et attendis ses explications :


Je hochai vigoureusement la tête et me retournais pour aller près du grand arbre qu'elle m'avait indiqué. Se plaçant au centre de la clairière, la guerrière avait fermé ses yeux et tendu ses oreilles, nous pouvions commencé. Me plaquant au sol, les poils de mon ventre frôlant le sol sous mes pattes, je me mis à avancer avec précaution, lentement, le regard fixé sur Lisha, j'étais déterminé. Je ne pus avancer que de un ou deux pas avant que ma queue, qui trainait sur le sol fit craquer quelques feuilles bruyamment, ce qui n'échappa pas à ma mentor. Elle ouvrit ses yeux dorés en m'observant en souriant et dit :


Oui, j'étais un peu de mauvaise foi mais bon. Retournant au pied de l'arbre tandis que Lisha refermait ses yeux, je me replaçais, prenant soin de garder ma queue bien haute cette fois-ci, mais je produisis encore un bruit de feuilles craquantes. Ce n'était ni ma queue, ni mes pattes, mais mes ailes, que j'avais laissé pendre cette fois-ci. Je grognai de frustration et retournai vers l'arbre sans avoir besoin que ma mentor me le dise, elle avait du m'entendre de toutes façons.


Légèrement agacé, je levais ma queue et mes ailes cette fois ci, qui étaient plaquées contre mon corps et recommençai l'exercice. Je pus avancer un peu plus, mais j'eus la stupidité de poser ma patte sur une brindille qui craqua bruyamment. Dépité, je m'affalais sur le sol, les oreilles basses tout comme mes ailes, la mine morose. Je levai mon regard bleu sur Lisha et lui demandai :

Il recommença. Ses premiers pas étaient un peu plus légers, mais pas encore assez. Lisha ouvrit les yeux et le regarda. Il pestiféra après ses ailes soit disant gênantes, et retourna près de l'arbre tandis que la jeune louve brune referma les yeux. Il recommença. Même si Lisha l'entendait marcher, elle n'ouvrait pas les yeux. Elle ne se mettait en mouvement seulement lorsque son jeune élève fesait une faute plus bruyante. Il avait encore du progrès à faire, mais elle sentait bien que ce petit avait du courage et de la détermination. Il atteindrait le but qu'il s'était fixé. Kagy fit craquer une branche, puis il s'affala par terre, découragé.

"C'est impossible à faire ton exercice ! Tu veux bien me montrer ?"

Lisha sourit. La partie amusante pour elle allait commencer.

-Oui, évidemment !

Elle se leva, et lorsqu'elle passa à côté de Kagy, elle lui indiqua l'endroit où elle s'était tenue. Déjà, lorsque la jeune louve marchait, elle avait cette démarche souple et silencieuse typique de son enseignement. Kagy n'aurait sûrement jamais la discrétion que Lisha avait acquise, car elle avait développé cette capacité à cause du pouvoir de son propre mentor. Il avait le don spécial de ressentir les vibrations du sol. De ce fait, il ne fallait faire ni bruit, ni pas lourd. Lisha se plaça près du grand arbre, puis s'assura que Kagy était prêt.

Puis elle commença. Sa façon de se mouvoir était inédite. Elle avançait rapidement, ses pattes effleurant la terre avec une douceur infinie. Sa queue lui servait de balancier pour tenir en équilibre, et elle était en perpétuel mouvement. Ses yeux analysaient le sol, le décor et Kagy à une vitesse étonnante, de sorte que rien ne lui échappait. Elle se tenait le dos plat, la tête légèrement baissée, le ventre assez loin du sol pour ne le toucher en aucun cas. Lisha arriva très vite près de Kagy. Elle lui toucha l'épaule et lui offrit un sourire radieux.

-J'ai gagné ! Je te montre.

Elle refit des gestes identiques à ceux qu'elle avait pendant le jeu. Elle passa même dans les feuilles mortes. Et il n'y avait pas un bruit dans la clairière. Elle se stoppa et s'assit après quelques minutes.

-Tes pattes doivent être parfaitement coordonnées pour arriver à marcher sans bruit. Lorsque tu auras appris tout cela, tu pourras même courir sans que personne ne te remarque. Tu seras un chasseur hors pair si tu arrives à maîtriser cette technique. Aujourd'hui, tu es très fatigué, je le vois bien.

Elle désigna le soleil qui glissait lentement vers l'horizon.

-Et puis il faut que tu rentres vite chez toi pour ne pas inquiéter tes proches. Pourrais tu revenir demain ? Ou tu ne pourras venir me voir que certains jours ?

Ce fut avec joie que Lisha décida de me montrer que cet exercice était bel et bien possible à réaliser. Elle m'indiqua où me placer tandis qu'elle même allait au pied de l'arbre où je me tenais encore il y'a quelques instants. Assis face à elle, au centre de la clairière, la queue ramenée devant mes pattes, je fermai mes yeux, les oreilles bien droites pour être sur de percevoir chaque bruit de l'endroit. Etrangement, je n'entendais que le gazouillis lointain d'un oiseau et la caresse du vent, pas un bruit de pas, ni craquement de branches ou de feuilles. Toujours les yeux clos, je fronçai le museau, je sentais pourtant son odeur, elle était là, dans la clairière mais où ? Je ne savais pas. Finalement, je sentis une légère pression sur mon épaule et j'ouvris les yeux, pour découvrir la louve brune à quelques centimètres de mon museau un joyeux sourire peignant son visage. Etonné qu'elle n'ait vraiment produit aucun bruit jusqu'à moi, je papillonnai des yeux pendant plusieurs secondes, jusqu'à ce qu'elle s'exclame d'une voix légère :


Ma mentor se mit alors à avancer, silencieuse, comme-ci ses pattes ne touchaient pas le sol, elle lévitait. Elle passa même dans un tas de feuilles mortes sans qu'aucune ne craque sous ses pattes, contrairement à moi qui avait fait craquer bon nombre de brindilles pendant mes essais ! Légèrement dépité de ne pas avoir réussi son exercice, je ne laissai rien paraître cependant, attendant que Lisha veuille bien m'expliquer comment elle pouvait marcher ainsi. Ce qu'elle fit sans tarder.


Tout en souriant, je hochai ma tête, j'avais bien compris ses consignes, il fallait maintenant que je réussisse à les appliquer. Enfin, même si j'avais dit le contraire, il était vrai que je commençai à bailler de plus en plus, et mes pattes étaient de plus en plus raides, le voyage jusqu'aux tanières allait être très long... Pensant à cela, je poussai un petit soupir, au moins, cela me permettrait d'essayer de marcher sans bruit pour ne pas attirer l'attention...


J'observais le soleil qui disparaissait peu à peu, donnant des teintes orangées au ciel. Je ferai bien de me dépêcher si je ne voulais pas rentrer pendant la nuit... J'allais me faire sermonner ça c'était sur, autant limiter les dégâts. Je réfléchis ensuite à la proposition de Lisha. Revenir le lendemain, ça, ça n'était pas certain. Je risquai de me faire punir pour revenir si tard aux tanières, je ne risquai pas de pouvoir ressortir dés le lendemain... De plus, demain j'aurai des courbatures, je le sentais déjà, et il faudrait que je m'entraîne à marcher discrètement seul pour pouvoir le lui montrer après. Mon choix était donc fait.


Je jetais un regard au soleil qui disparaissait de plus en plus dans le ciel. Me dressant sur mes pattes, je commençai à m'éloigner, grommelant un peu en sentant mes pattes raides. Je me tournai vers Lisha et lui souris, j'étais content qu'elle devienne mon mentor, même si ce n'était que pour une période très courte. Puis, je tournai encore la tête vers la jungle, épaisse, sombre, et grande, ce qui fit apparaître une certaine inquiétude en moi. Est-ce que je réussirai à m’orienter à travers tous ces arbres qui se ressemblaient ? Pas sur… Je ne voulais pas risquer de me perdre en plus. Jetant un regard à ma mentor, les oreilles baissées signe de mon embarras, je me raclai un peu la gorge avant de déclarer :


Je lui fis un petit sourire, espérant ne pas la décevoir, attendant avec une certaine appréhension sa réponse.

Le louveteau trouva la proposition de Lisha juste, et après lui avoir dit qu'il ne pourrais pas venir le lendemain, il proposa qu'ils se revoient le jour de pleine lune. La jeune louve opina, en signe d'accord. Elle vu le louveteau scruter le fond sombre de la Jungle. Il se tourna vers elle, les oreilles légèrement baissées.

"Est ce que tu pourrais m’accompagner jusqu’à la frontière ? J’ai peur de me perdre dans cette jungle."

Lisha lui sourit, et hocha de la tête. Peu de loups savaient comment s'orienter dans cette immense Jungle.

-Oui, bien sûr. Mais alors fessons vite, on m'attends aussi chez moi.

Elle s'engagea dans l'épaisse forêt sans humer l'air. Elle connaissait chaque arbre, chaque caillou par cœur, elle aurait presque pu s'y aventurer les yeux fermés. Elle ne fessait pas attention à sa façon de marcher, mais ces pas étaient feutrés, presque inaudibles. Elle zigzagua entre les arbres majestueux, sauta par dessus les troncs abattus. Elle veilla à emprunter des raccourcis, des passages parfois étroit entre des roches ou sous des racines. Quand l'orée de la forêt fut dans sa ligne de mire, elle s'arrêta.

-Voilà, je te laisse ici. Il serait dangereux pour toi comme pour moi qu'un loup de ton clan nous voie. On est jamais trop prudent.

Elle se détourna avec une grande élégance, ses tresses mêlées de plumes tapotant doucement contre ses joues.

-Travaille bien, et fait bien attention aux lions ! Dit-t-elle avec un grand sourire. Nous nous reverrons ici le jour de pleine lune.

Sans faire le moindre bruit, elle fit quelque pas dans les fougères épaisses de sa jungle, puis elle adressa un dernier sourire à Kagy. Nul ne pu savoir où elle s'en était allée. A peine se retourna-t-elle, que la belle louve aux yeux d'or avait disparu...

Je hochai la tête, conscient qu'elle aussi devait avoir une famille ou du moins des proches qui pouvaient s'inquiéter de la voir rentrer tard, tout comme moi. Enfin, elle était plus âgée que moi, au moins, elle, elle ne risquerait pas ou du moins, elle avait beaucoup moins de chances que moi de se faire sévèrement réprimander. Repensant à cela, je poussai un petit soupir, me préparant déjà mentalement aux cris, remontrances et autres de ma nourrice et ou de mon père. Je secouai la tête, enfin, je verrai bien le moment venu. En attendant, je suivais Lisha dans cette épaisse jungle, elle qui semblait s'orienter avec tant d'aisance, passant entre deux rochers très fins sans appréhension, bifurquant près de un arbre plus imposant qu'un autre, sautant par-dessus un tronc d'arbre mort qui semblait être la depuis un petit moment, pendant que moi je la suivais péniblement, sentant mes pattes plus lourdes que jamais et la fatigue s'emparait peu à peu de mon esprit. Je baillai à m'en décrocher la mâchoire, laissant paraître ma dentition encore jeune et continuai d'avancer, jusqu'à ce que ma mentor déclare :


Lisha se retourna donc de sa démarche souple et élancée qui semblait lui être caractéristique puis, me déclara une dernière fois :


Je restai quelques instants à observer l'endroit pour être bien sur de le reconnaître à notre prochaine rencontre, pour finalement rejoindre la frontière, soulagé de reconnaître l'odeur de mon clan enfin. Je me tournai vers l'épaisse jungle, Lisha avait déjà disparu entre les arbres, je ne l'avais même pas entendu partir. Je souris alors, un jour, ce serait moi qui disparaîtrait telle une ombre sous le regard étonné de mon propre apprenti. Gardant un sourire de cette rêverie, je me remis à avancer, me hâtant un peu, impatient de pouvoir enfin poser ma carcasse sur le sol duveteux de ma tanière et d'enfin reposer mes membres douloureux.

HS: