La souris tentait vainement de prendre la fuite, mais des pattes noires lui bloquaient le passage. Son souffle était trop rapide, ses yeux apeurés. La bestiole releva la tête et croisa le regard de l’animal infâme qui la maintenait prisonnière. Sa bouche était entrouverte en un sourire carnassier, et on pouvait entrevoir les rangées de dents aiguisées. Elle vu à cet instant la gueule du monstre s’ouvrir, et foncer à toute vitesse vers elle. Sa vie s’acheva rapidement, dans un souffle épuisé.

Okana avala sa proie en ricanant. Elle n’avait même pas faim, mais elle avait beaucoup aimé regarder cette souris se débattre. Elle s’assit contre le tronc d’un arbre, et regarda l’eau du Ruisseau couler tranquillement. Elle aimait bien cet endroit, elle y était bien au calme, parce que tout le monde pensait que ce stupide ruisseau était maudit, ou un truc débile du genre. Du coup, personne n’était assez couillu pour se bouger les fesses et venir voir que cet endroit était vraiment calme, en fait. Fatiguée par tant de beauté et de quiétude, la louve au museau noir se leva, et bailla longuement. C’était chiant d’être assassin quand il n’y avait personne à assassiner. Elle se promena quelques temps le long de la rive, avant de trouver un arbre parfait pour se reposer. Sauf qu’un peu plus loin, un truc couinait et fessait un raffut pas possible. Elle ne regarda même pas ce que c’était, et prit un air agacé.

Okana était une louve de petite taille, qui grimpait aux arbres avec une facilité déconcertante. Ses griffes s’allongèrent et durcissent, elle les planta dans le tronc et commença sa montée. Elle s’étendit sur une branche bien solide, à l’abri des regards, et elle tenta de dormir. Seulement ce truc hurlait. Elle poussa un grognement, et daigna jeter un coup d’œil à la chose qui hurlait depuis tout à l’heure.

-Ta gueule ! Cracha-t-elle

Puis elle remarqua que c’était un louveteau qui avait poussé ces cris. Elle regarda un instant la banale petite chose, puis remarqua qu’elle était embourbée. Elle prit un air profondément désolé, et descendit aussitôt de son arbre. Elle s’approcha du louveteau, comme si elle allait l’aider. Puis elle s’assit pas trop loin de la flaque de boue, et elle éclata d’un sale rire mesquin.

-Et ben dis-moi petite fille, tu es coincée ? Ricana-t-elle

Enfin quelqu’un à faire chier.

Okana allait éclater de rire. Mon dieu, cette gamine n’était pas au courant ? Nan, c’était tout simplement impossible qu’elle ne connaisse pas la démone. N’empêche qu’elle suppliait le Feu Follet, le sale animal qui avait tenté de tuer le fils de l’Alpha du Feu. La louve la regardait se débattre dans la boue avec un sourire en coin, et les yeux amusés. Quand la gamine implora son aide, une sale expression se dessina sur son visage.

-Les assassins n’ont pas vraiment l’habitude de sauver les autres, ils font juste les sales boulots. J’ai déjà noyé des loupiots comme toi, tu crois vraiment que je vais me bouger le cul pour venir te chercher ?

Elle se releva, et se pencha au-dessus de la flaque de boue, approchant dangereusement sa gueule de la louvette. Sa tête s’arrêta, et elle dévoila une rangée de dents blanches, voire légèrement argentées (C’est à cause de son pouvoir, ses dents peuvent se métalliser, c’est pour ça qu’elle a les dents argentées).

-Les idiotes comme toi, on les noie.

Elle la fixa un moment dans les yeux, son demi-sourire plaqué sur la face. Puis elle se recula, et s’assit pas trop loin de la flaque.

-Enfin ! Puisque tu vas te noyer toute seule, j’accepte de te faire la conversation avant que tu meures. Tu dois être contente de pouvoir faire la causette avec le Feu Follet, c’est un rare privilège tu sais ma petite idiote ! En temps normal, les moustiques comme toi, je les mange quand la nuit tombe, c’est plus flippant comme ça.

Elle ricana, et enroula sa queue autour de ses pattes. Elle allait bien s’amuser.

PS: Le Feu Follet, c'est son surnom, son surnom de criminelle. Elle est pas vraiment connue sous le nom d'Okana mais plutôt du Feu Follet (: Donc si Phoebe la connait de nom, c'est normal

-Et les louves comme toi on devrait les tuer !

Okana n’eut aucune réaction logique à cette phrase salée. En fait, elle avait essayé de se suicider plusieurs fois sans succès durant sa vie. Maintenant que la folie lui broyait le cerveau, elle ne pensait même plus à ça.

-Et bien alors pourquoi personne ne le fait ? Tu sais petite, il y a des vérités qu’on cache aux enfants parce qu’elles ne sont pas belles à entendre.

La gosse réussit enfin à mettre ses maudites pattes avant sur la terre ferme. Le Feu Follet observa avec dégoût sa fourrure couverte de boue.

-Combien de comme moi, avez vous tuer.

Okana ricana. Cette gamine ne connaissait pas grand-chose aux réalités de la vie. Elle n’était sûrement pas au courant que les assassins étaient plus en quête de contrats que de cadavres.

-Ouh ouh, comme toi ? Aucune. On ne me demande pas souvent d’assassiner des louveteaux. Mais si par « comme moi », tu sous entends « des idiots », et bien j’en ai tué 4. Seulement il y a des choses que la plupart des loups comme toi ignorent.

Elle passa sa langue sur ses babines avant de reprendre.

-Les assassins ne tuent pas sans raisons… Tu vois, des salopards qui désirent tuer quelqu’un sans avoir l’air coupable, il y en a pleins sur cette île. Seulement, pour garder leur dignité et ne pas se faire bannir, ils vont se frotter à ceux qui n’ont rien à perdre. Ils leur demandent de commettre des meurtres infâmes. Ça c’est mon job tu vois. Et pour que les deux parts soit gagnantes, je passe des contrats avec eux. Eux m’apportent une proie, et ils promettent de ne pas indiquer l’endroit où je me trouve, et moi je vais voir leur chère victime.

La louve se pencha vers l’avant, ses yeux bleu turquoise glacés fichés dans ceux de la petite louve. Il n’y avait qu’une poignée de loups qui savaient la contacter, et on n’arrivait pas à elle aussi facilement qu’on ne le pensait. Lorsqu’on contactait un assassin, on était lié à lui par un contrat très étroit. Le moindre écart pouvait entrainer la mort. Et Okana se fessait un plaisir à descendre les traîtres avant qu’ils ne vendent la mèche. D’ailleurs, dans ses 4 victimes, une était une traîtresse qui avait essayé de se moquer d’elle.

-Je ne tue pas s’il n’y a pas d’intérêt pour moi de le faire. Certains loups pensent que les assassins sont juste des déchets, et ils n’ont pas tout à fait tort. Seulement ils n’ont pas conscience que si certains loups n’étaient pas une grosse bande de salopards, et bien les assassins n’existeraient pas.

-Vous avez un rang alors ! Vous travaillez !

Le Feu Follet haussa les épaules. Ouais, un travail peut être mais pas un rang. Être un solitaire est un statut, être un assassin est un choix. Que c’est beau de bourrer le crâne des enfants.

- Si j’avais voulu avoir un rang je ne me serais pas cassée de mon clan. Et je n’appelle pas ça un travail, mais plutôt un passe-temps.

Okana avait l’oreille attentive, et elle repéra rapidement les jappements lointains d’un loup à la recherche d’un autre. Elle jeta un coup d’œil rapide à la louvette pour vérifier si elle n’avait pas entendu.

-Seulement petite, j’adore mon job. J’adore tuer. Ça ne l’oublie pas.

Elle se pencha sur la louvette à moitié sortie de la boue, sortit une griffe. D’un geste léger elle dessina sur une des pattes hors de la boue une petite croix. Entailles peu profondes, mais qui laisserais sûrement une légère cicatrice pendant quelques temps.

-C’est ma petite signature. Si quelqu’un la voit, on pourrait te suspecter d’être mon alliée, car il est rare que les loups qui me rencontrent restent en vie. Alors tu fermes ta gueule à mon propos, sinon je viendrais te disséquer dès que l’opportunité se présentera. Lui chuchota-t-elle à l’oreille

On pouvait parfaitement voir les rangées de dents chromées, et le regard malsain que la louve portait sur la gamine. Les aboiements furent plus forts, plus proches. Okana releva la tête, et n’apercevant pas encore de loups elle ajouta :

-Voilà un petit contrat d’assassin. Tu ne dis rien à mon sujet, et je te laisse la vie sauve. Les traîtres mourront.

La Jungle bordait les territoires de l’Eau, et elle s’en alla dans cette direction. Sans un bruit, sans faire craquer une seule branche, une seule feuille. Comme un fantôme ou un esprit. Elle disparut à l’orée des bois, bien avant que le loup ou la louve arrive. Son odeur, semblable à celle de la forêt, s’était confondue avec l’environnement. Comme si elle n’avait jamais mis une seule patte ici.
Comme un mirage.

Spoiler: